Un article de Marion Nicolas, toujours très intéressant…!

Qui n’est jamais tombé sur un oiseau qui restait accroché aux barreaux en dépit de la cage ouverte ?

Qui refuse de voler, d’explorer dans la maison (ou ailleurs) alors qu’il en aurait la possibilité ? Qui vous voit partir et crie comme s’il était enfermé alors que ce n’est pas le cas ? Qui remue les ailes frénétiquement mais ne se lance pas (souvent interprété comme de l’excitation / du jeu d’ailleurs) ?

En bref : la cage est ouverte mais l’oiseau ne bouge pas : il reste accroché sur le côté, sur la porte, ou sur le toit de la cage.

A la fois outil de protection contre les dangers de la vie en maison, mais aussi outil de contrainte physique (espace trop étroit donc mobilité intérieur réduite ET/OU frustration générée par l’impossibilité de vous rejoindre) la cage est littéralement une prison dorée pour nos oiseaux.

Lorsqu’il est sur la cage, on observe la plupart des comportements normaux : il fait sa toilette, mange, « discute », de toute évidence, tout va bien. Alors… où est le problème ?

Ce que l’on peut observer sur les oiseaux qui sont restés des années enfermés en cage :

📌 comportements stéréotypés (mouvement de balanciers la tête / frétillement des ailes.

Ces comportements peuvent perdurer partiellement lorsqu’ils sont sortis de ce contexte.

Les observations qui m’ont véritablement coupé le souffle sont celles d’oiseaux sortis d’enfermement prolongé qui sont remis sur des barreaux – que ce soit une cage ou pas / que la cage soit ouverte / ou qu’il soit à l’extérieur !!! – alors les comportements stéréotypés réapparaissent et l’oiseau paraît de nouveau « enfermé », même si celui ci ne l’est plus !

La prison va au delà de la barrière physique.

Il va falloir faire tomber les barrières… mentales.

Je ne m’étendrais pas ici sur les stéréotypies je renvoi à l’excellent article écrit par Antenne Zoologie :

📌 Neophobie

L’oiseau va avoir peur de tout, un nouvel invité ? Un nouvel animal ? Un nouveau bruit ? Un changement dans la disposition de la maison, et il voudra encore moins sortir. Et ca peut aussi s’étendre a des choses au l’on penserait acquis : peur des nouveaux jouets, des branches, refus de la nouveauté dans l’alimentation. A tel point que satisfaire aux besoins en eux même de l’oiseau et trouver des leviers d’action en deviennent un vrai casse tête.

📌Atrophie musculaire

Les muscles pectoraux chez les oiseaux sont les muscles les plus puissants de tous. Fortement irrigués, nos perroquets sont en tout point taillés pour l’expression du vol / de la mobilité. Les priver de la mobilité retire une partie de l’expression de leur comportement. Il s’ensuit nécessairement un impact sur la prise alimentaire, et le bien être de façon générale.

📌 Capacités cognitives réduites

Résoudre des problématiques du quotidien qui devraient pourtant être simples relèvent du parcours du combattant. Aller d’un point A a un point B, sauter etc etc…

Avec une des conséquences pour l’oiseau et pour nous assez fréquente :

▶️ Sensation d’acculement

Un oiseau qui ne se sent pas « libre » de bouger, que ce soit par manque de capacité ou par peur, impuissance apprise, ailes remigées, neophobie (ou n’importe quelle autre raison), a plus de chance de se sentir « agressé » lorsque vous rentrez au delà de sa zone de confort.

L’explication est simple : un oiseau qui aurait eu un mauvais historique d’apprentissage, une peur ou autre à l’approche risque d’anticiper celle ci en redoutant qu’il y ai une contrainte.

N’ayant pas les ressources pour fuir, il ne reste qu’une solution : l’attaque.

On risque de développer ainsi la peur, les craintes, un mal être généralisé et de l’agressivité.

En consultation lorsque je demande combien de temps en moyenne est sorti l’oiseau dans la journée on me répond pour ce type de cas, « tous les jours, toute la journée ». Si de prime abord la réponse pourrait paraître extraordinaire, qu’en est il dans les faits du point de vue de l’oiseau ?

Lorsqu’on ouvre à l’oiseau mais qu’il reste dans ou sur sa cage, peut on réellement affirmer qu’il est sorti ?

« Oui mais s’il ne veut pas on ne va pas le forcer »

Bien évidemment ! On ne contraint jamais un individu quoiqu’il en soit, cependant ce n’est pas nécessairement qu’il ne veut pas, mais bien souvent plutôt car il ne peut pas ( dans la mesure où il n’a pas les compétences, qu’il a des émotions négatives fortes etc etc).

Lui donner progressivement les compétences tout en le rassurant sur ses propres capacités et l’environnement autour par un entraînement ajusté, mesuré et personnalisé sera ici la clef du succès.

Cet article n’a pas vocation à vous dire « d’ouvrir les cages et que tout ira bien », ce serait faux et malhonnête et risquerait de mettre en danger certains individus plus qu’autre chose. Simplement d’inviter à penser différemment la captivité et les comportements de vos oiseaux.
La mobilité est nécessaire à l’expression des comportements normaux et du bien être de votre oiseau.
(Je renvoi ici à l’article que j’avais écrit concernant la taille des ailes : https://www.facebook.com/462583977590924/posts/1165998360582812/?d=n).
L’environnement dédié et approprié se doit donc d’être le plus grand possible

Si vous avez un oiseau issu de ce type de captivité, je vous invite à vous faire suivre par un professionnel afin de l’aider au mieux dans sa réhabilitation.

Se sortir en douceur de ces schémas est un processus long et fastidieux ou le risque de résurgence (réapparition des comportements) est élevé, et où il est très facile de submerger l’oiseau et donc de ralentir voir reculer dans la progression involontairement.

En ce moment j’ai beaucoup de personnes qui ont des oiseaux de sauvetages (qui ont fait familles sur familles, nourriture inadaptée, lésions, cage étroite bref des loulous fracassés), aux comportements parfois difficiles et pourtant des personnes qui se donnent de façon inconditionnelle pour ces oiseaux, afin de trouver des solutions pérennes et adaptées.

Vous savez que j’y suis particulièrement sensible… avoir la possibilité de soutenir et d’aider efficacement ces oiseaux est littéralement la raison du pourquoi j’ai réalisé ce métier après des années à réparer des loulous tout cassés bénévolement en asso… pour moi c’est un immense aboutissement, et je m’estime très chanceuse et fière, de la confiance que vous me portez.

Alors à toutes ces personnes si dévouées et qui offrent ce que ces oiseaux n’auraient jamais pu espérer autrement, un immense merci
📸 Haku & Hino en Vol Libre
Marion Nicolas
Certified Professional Bird Trainer
Fear Free Certified Professional
Source : Marion Nicolas, juin 2022, publication Facebook, disponible en ligne : https://www.facebook.com/Mayiion31/posts/3475819695986782