Plurispécifique = Plusieurs espèces. Margaux Deman nous parle de la cohabitation entres individus, d’espèces différentes…

Le groupe social plurispécifique

Adopter un congénère pour son perroquet est l’un des paramètres indispensables à son épanouissement en captivité.
Très régulièrement, les passionnés que nous sommes ne se contentent pas d’un seul autre compagnon, mais de plusieurs autres.On me demande souvent si toutes les espèces peuvent cohabiter ensemble et dans quelle mesure nous devons « faire confiance » aux oiseaux lorsqu’ils vivent en communauté hétérogène.
Avant de vouloir faire vivre plusieurs individus d’espèces différentes, il est essentiel de disposer d’un espace commun suffisamment grand et bien aménagé.
Un espace bien pensé est la garantie d’une cohabitation sans problème. Ce sujet a déjà fait l’objet d’un précédent article, mais pour rappel voici ce qu’il faut respecter pour limiter les conflits :
– Mettre à disposition suffisamment de points d’eau et de nourrissage.
– Installer de nombreux perchoirs pour limiter la compétition spatiale et la territorialité.
– Ne pas installer de nids.
– Mettre en place des zones de repli et brises vues.

1) Peut-on faire cohabiter des espèces de gabarits différents ?

Dans la mesure du raisonnable, cela reste possible s’il on maintient ensemble des oiseaux compatibles.
Par compatibles il faut entendre « ayant des besoins et des outils de communication proches ».
Un gris du Gabon peut ainsi aisément cohabiter avec un youyou, pourtant bien plus petit, mais pas raisonnablement avec une conure ou une perruche calopsitte.Par ailleurs, certaines espèces posent davantage de problèmes dans un groupe hétérogène que d’autres. Par exemple, toutes les espèces appelées communément « conures » se caractérisent par un tempérament hautement territorial et querelleur.
Les conures ne craignent absolument pas le conflit avec un perroquet bien plus gros et n’hésitent pas à lancer l’assaut pour défendre un perchoir ou un partenaire.
Elles se mettent ainsi en danger si leur adversaire est peu conciliant dans ses réactions, ce qui est le cas des espèces africaines (gris du Gabon et autres poicephalus).
Les petites espèces comme les perruches australiennes, bien moins querelleuses que les conures, peuvent malgré tout faire les frais d’un coup de bec fatal, simplement par inadvertance.
La différence de taille et de force de pression du bec ne pardonnent pas !
Paradoxalement, certaines espèces de petite taille peuvent également faire des dégâts sur des oiseaux de gabarit équivalent ou plus gros.
Les caïques par exemple ou encore les perroquets maillés (proches cousins des caïques) peuvent grièvement blesser voire tuer un autre oiseau pour un simple conflit de territoire. Ces espèces, ainsi que les conures, ne doivent donc idéalement pas être placées avec d’autres espèces. Un jour où l’autre vous risquez d’avoir une mauvaise surprise !
Les jeunes oiseaux étant plus conciliants, les exemples de cohabitation réussies avec ces derniers ne sont pas représentatifs.

2) Peut-on faire cohabiter tous les individus selon leur vécu ?

La socialisation du jeune perroquet a un impact considérable quant à sa capacité à s’intégrer et cohabiter au sein d’un groupe social.
Les individus ayant grandi sans congénère les premiers mois à premières années de leur vie développent régulièrement une agressivité exacerbée. De sorte que, plutôt que d’utiliser des attitudes préventives afin d’éviter une confrontation, ils passent directement à l’acte sans prendre de pincettes.
Ces cas particuliers ne sont pas des cas désespérés mais doivent disposer d’un groupe social d’oiseaux de même gabarit qui puissent leur tenir tête, voire *les remettre à leur place*.
Ces oiseaux hyper agressifs ont appris à l’être, ils peuvent alors ré-apprendre à communiquer normalement et adopter des réactions plus modérées.
Quoi de mieux qu’un groupe de perroquets pour cet apprentissage ?

3) Peut-on faire cohabiter des espèces très différentes ? 

Il est évident que la vie en communauté d’espèces proches, appartenant au même genre (ara, amazona, aratinga, pyrrhura, pionus, poicephalus, agapornis, cacatua, psittacula…) est bien plus aisé que de tenter une cohabitation avec des espèces fondamentalement opposées.
Difficile n’est pas impossible, en particulier s’il s’agit de jeunes oiseaux qui grandissent et évoluent ensemble.
Malgré tout, la cohabitation avec des individus plus âgés reste possible également en prenant soin d’intégrer les oiseaux de manière très progressive et intelligente (notamment en améliorant l’aménagement de l’espace commun).Ainsi, dans notre volière communautaire actuelle, nous faisons cohabiter :
4 aras (chloroptère, ararauna, gorge bleue et Lafresnaye).
3 cacatoès australiens (oeil nu, rosalbin et Banks).
1 amazone à front bleu.
1 gris du Gabon.
2 youyous du Sénégal.

1 perroquet de jardine.

Il est intéressant de constater, sans trop de surprise, que les différents oiseaux se regroupent par genre ou par espèces génétiquement proches. Ainsi les trois cacatoès interagissent davantage entre eux qu’avec les autres oiseaux. Les aras interagissent uniquement entre eux. Le gris du Gabon s’intéresse davantage aux youyous et au perroquet de jardine, alors qu’il a grandi avec l’amazone.

Aucun accident n’est à déplorer malgré la diversité et les différences de gabarits.

4) Dans quelle mesure les conflits au sein d’un groupe sont-ils normaux ? 

Les conflits sont inévitables et font naturellement partie de la dynamique d’un groupe. Les oiseaux peuvent se chasser, se bousculer, se menacer et parfois même se tirer les plumes dans le pire des cas.
Ces attitudes, parfois impressionnantes lorsqu’elles sont accompagnées de cris, s’observent aussi bien en captivité que dans la nature. Les perroquets ne sont pas toujours tendres et ne semblent pas éprouver de remords ni de pitié lorsqu’ils s’en prennent à un autre.
Vous devez absolument éviter de vous en mêler et d’intervenir, sauf en cas d’extrême urgence, si la victime n’est pas en mesure de s’enfuir par exemple.Le conflit devient anormal si :
– Un seul oiseau du groupe est régulièrement ciblé (le bouc émissaire).
– On observe des courses poursuites incessantes (de plusieurs minutes).
– On constate des blessures régulières sur un ou plusieurs oiseaux.
– On constate une blessure grave.
Si l’une de ces situations est observée chez vous, alors il faudra isoler le ou les individus agressifs, retenter une cohabitation après un nouvel aménagement de l’environnement, modifier le groupe social (en retirant ou ajoutant d’autres individus), ou choisir de les maintenir séparément du reste du groupe.
Quoiqu’il en soit, la vie en groupe plurispécifique apporte aux oiseaux un bénéfice considérable en captivité. Les interactions, positives comme négatives contribuent à stimuler et combler l’individu sur un plan social.
Enfin, Les espèces peuvent calquer des comportements les unes sur les autres au point que l’on finit par constater une certaine homogénéisation de l’ensemble des habitudes et préférences des oiseaux qui constituent le groupe. Les particularités propres aux espèces s’estompent alors peu à peu.
Référence 
Margaux Deman, juillet 2019, Le groupe plurispécifique, article disponible en ligne : https://fr.tipeee.com/parole-de-plume/news/63502, consulté le 13 juin 2021
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